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Compte rendu de la session inaugurale du groupe d'études sur les « Pôles, les TAAF et les Grands fonds océaniques »

Session inaugurale

Mercredi 22 mars 2023 - Salle Colbert de l'Assemblée Nationale

Déroulé

Mettre en œuvre la Stratégie polaire française au bénéfice de la recherche, du climat et de la biodiversité

Introduction :
Mme Guetté, co-présidente
M. Pahun, co-président


Intervenants :
Mme Florence Jeanblanc-Risler - Préfète des TAAF
Vice-Amiral Xavier Petit - Sous-Chef d'Etat Major de la Marine "Opérations"
M. Yan Ropert-Coudert - Directeur de l'Institut polaire Paul Emile Victor
Mme Antje Boetius, Directrice de l'Institut Alfred Wegener
M. Marc Eleaume - Représentant scientifique français à la CCAMLR
Mme Claire Giry - Directrice Générale de la Recherche et de l'Innovation du MESR
M. Olivier Poivre d'Arvor - Ambassadeur aux enjeux maritimes et aux pôles
SE Mme Gillian Bird, Ambassadrice d’Australie en France
SE M. Niels Engelschiøn, Ambassadeur de Norvège en France
M. Jean-Louis Bourlanges - Président de la Commission des Affaires étrangères
M. Eric Coquerel - Président de la Commission des Finances
M. Pascal Lamy - Président du Forum de Paris pour la paix
M. Jean Jouzel - Paléoclimatologue


COMPTE-RENDU

La réunion est ouverte à 14 h 00

Madame la présidente Clémence Guetté (LFI-NUPES) souligne dans son propos introductif l’importance des sujets et des enjeux portés par le groupe d’études.
Madame la présidente salue la présence de nombreux scientifiques à cette session inaugurale du groupe d’études et indique qu’elle est honorée de siéger au conseil consultatif des Terres australes et antarctiques françaises. En effet, ces territoires sont trop souvent ignorés des débats politiques alors qu’ils représentent une source considérable de connaissances scientifiques sur le changement climatique et sont un enjeu géopolitique. Les travaux à venir du groupe d’études permettront d’approfondir ces différentes questions, ainsi que de travailler sur la stratégie polaire française. Madame la présidente salue l’action de Monsieur le co-président Jimmy Pahun afin de consolider les budgets consacrés à la recherche polaire depuis plusieurs années.   

Des échéances importantes sur des thèmes d’intérêt pour le groupe d’études arrivent, comme la conférence des Nations unies sur les océans qui aura lieu à Nice en juin 2025 et sera présidée par la France et le Costa Rica. Dans ce contexte, le dernier rapport du groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) alerte sur les conséquences du changement climatique, notamment avec la montée des océans, la transformation des paysages et les menaces que feront peser les événements climatiques extrêmes sur une très grande partie de l’humanité à l’horizon 2100. Madame la présidente rappelle que les océans et les pôles sont des écosystèmes fragiles : le rôle de la France et de ses partenariats internationaux est crucial pour leur protection. La France est devenue progressivement une puissance polaire et doit se montrer à la hauteur de cette ambition sur les plans géopolitique, environnemental et scientifique. Madame la présidente souhaite que le groupe d’études soit une force de proposition afin de garantir des moyens sur ces différents points.   

Monsieur le président Jimmy Pahun (Modem) salue la présence des députées et députés à la session inaugurale du groupe d’études, qui permettra à celui-ci de peser durant le vote des textes budgétaires.
Il remercie de leur venue Madame la préfète, administratrice supérieure des terres australes et antarctiques françaises (TAAF), le vice-amiral Xavier Petit, Madame l’ambassadrice d’Italie, Madame l’ambassadrice d’Australie, Monsieur l’ambassadeur de Norvège, Monsieur l’ambassadeur des pôles et des enjeux maritimes, Monsieur le président du forum de Paris sur la paix, Madame la directrice de l’Institut Alfred Wegener, Madame la directrice générale de la recherche et de l’innovation au ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, ainsi que les scientifiques, les chercheurs, les explorateurs, les marins, les peintres et écrivains de la Marine, les entrepreneurs et acteurs du monde polaire et maritime.

Monsieur le président indique que cette session inaugurale du groupe d’études est centrée sur l’ambition polaire française ainsi que sur la concrétisation de la stratégie endossée l’année précédente par le président de la République et le Premier ministre. Monsieur le président réaffirme l’intérêt de travailler sur les grands fonds océaniques, dans la continuité de la résolution adoptée par l’Assemblée nationale le 17 janvier 2023 et de l’accord historique obtenu sur le traité sur la conservation et l'utilisation durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale, c’est-à-dire en haute mer (processus dit « BBNJ »), lors de la cinquième session de négociations intergouvernementale qui s’est tenue au siège des Nations unies à New York du 20 février au 4 mars 2023. Il est également important de réfléchir sur ce sujet dans la perspective de la conférence des Nations unies sur les océans à Nice dans deux ans.   

 Monsieur le président rappelle qu’il a découvert, à la suite de son arrivée à la co-présidence du groupe d’études il y a trois ans, une recherche polaire sous pression et une France comme une grande nation polaire en recul sur les plans scientifique, environnemental et politique. Plusieurs députés, dans une démarche transpartisane, ont ainsi agi afin d’augmenter les moyens budgétaires et humains de l’Institut polaire français Paul-Émile Victor (IPEV). En 2022, le plafond d’emplois de l’IPEV a été rehaussé de cinq équivalents temps pleins (ETP) et des crédits ont été obtenus afin de lancer la rénovation de la station antarctique Dumont d’Urville. Une même démarche a permis de compenser pour 2023 les surcoûts liés à la hausse des matières premières et donc d’assurer la continuité de la présence française en Antarctique.

En réunissant les communautés polaires et maritimes, le groupe d’études doit permettre de relancer les travaux parlementaires afin de concrétiser la stratégie polaire française à l’horizon 2030. Cet effort est nécessaire pour celles et ceux qui font de la France une nation polaire, afin de défendre les intérêts stratégiques français et, aux côtés des partenaires internationaux, de garantir la sauvegarde des environnements polaire et austral.   

Monsieur le président appuie l’ambition de déposer une proposition de loi de programmation polaire qui viendrait garantir la trajectoire fixée par la stratégie polaire. La présence de nombreux scientifiques et de l’ensemble des institutions concernées par le sujet à cette session inaugurale du groupe d’études confirme l’importance de mettre en œuvre rapidement la stratégie polaire afin que la France conserve son rang de grande nation scientifique polaire. Les pôles sont une terre de paix, de science et de coopération internationale, mais également le siège de grands enjeux géopolitiques. Monsieur le président souligne l’importance de préserver la biodiversité des pôles, menacée par la pollution et une trop grande fréquentation touristique, dont la richesse entraîne les convoitises et les activités illégales.   

Madame Florence Jeanblanc-Risler, préfète, administratrice supérieure des terres australes et antarctiques françaises (TAAF), indique que son intervention portera sur les principaux enjeux pour les TAAF au regard de la stratégie polaire. 
Elle rappelle que les TAAF couvrent une immensité géographique qui représente 20 % de l’espace maritime français. Les TAAF disposent d’une administration et de moyen d’action spécifiques depuis leur création par la loi du 6 août 1955. C’est le dernier territoire d’outre-mer au sens de l’article 72-3 de la Constitution. Collectivité à statut particulier, régie par une clause de compétence générale, par le principe de spécialité législative et bénéficiant d’une autonomie administrative et financière avec un budget indépendant de celui de l’État – hors subventions, les TAAF sont sous l’autorité d’un administrateur supérieur, à la fois représentant de l’Etat et exécutif du territoire. Il est représenté dans chacun des cinq districts des TAAF par des chefs de districts. Le siège des TAAF est à Saint-Pierre à La Réunion.    

La présence française dans les pôles est organisée afin d’assurer le soutien à la recherche française et aux actions de protection et de gestion des espaces naturels uniques, comme les réserves naturelles terrestres et maritimes ainsi que les zones spécialement protégées en terre Adélie, tout en maintenant une activité économique durable avec la pêche et le tourisme. Cette présence doit également permettre l’utilisation et la valorisation du positionnement géostratégique de ces territoires. Enfin, il convient de conserver la potentialité d’une exploitation raisonnée à l’avenir des ressources des zones économiques exclusives et des extensions du plateau continental.   

Madame l’administratrice supérieure des TAAF estime que la stratégie polaire présente deux limites : elle ne dispose pas pour l’instant de moyens budgétaires dédiés et demeure dans un prisme essentiellement scientifique.

La clarification des compétences entre l’IPEV et les TAAF est le premier enjeu relatif à la mise en œuvre de cette stratégie polaire, en terre Adélie mais également sur les trois districts des terres australes afin d’éviter des doublons, notamment en matière logistique, mais aussi de rationalisation des coûts pour réattribuer aux missions essentielles des moyens financiers. Une mission d’inspection a été chargée par le ministre délégué chargé des Outre-mer de travailler sur ce sujet.   

Le deuxième enjeu est la réussite de l’inspection croisée de la France et de l’Australie en terre Adélie et sur la base australienne de Casey, qui portera notamment sur les moyens logistiques. Les TAAF sont chargées du suivi des activités françaises en Antarctique au titre du protocole de Madrid et en tant que représentant de l’État. L’objectif est de dresser un état des lieux le plus complet possible de la conformité au protocole de Madrid. Les TAAF travaillent sur ce sujet en collaboration avec l’IPEV depuis 2021.   

Le troisième enjeu est lié à l’encadrement des activités économiques que sont la pêche et le tourisme. Face à la croissance exponentielle du tourisme, avec 140 000 touristes en 2022, il est important de trouver des moyens d’encadrer le tourisme en Antarctique. Deux propositions ont été faites par la France : avoir des observateurs embarqués dans les bateaux de croisière afin de contrôler leurs activités ou avoir un instrument global encadrant les activités touristiques qui pourrait être adopté lors de la prochaine réunion consultative sur le traité de l’Antarctique (RCTA) au mois de juin 2023.  

Le quatrième enjeu est relatif au changement climatique pour l’avenir de ces territoires, en termes de perte de biodiversité, d’augmentation des aléas et des risques naturels, ainsi que des difficultés d’accès et de fonctionnement des bases antarctiques.   

Monsieur le vice-amiral Xavier Petit, sous-chef d’état-major de la Marine « opération », observe que la paix et la science sont deux sujets bien connus des marins : les enjeux de confrontation sont importants dans les zones polaires et la Marine appuie notamment la recherche scientifique par des moyens logistiques ainsi que par la sauvegarde des personnes et des biens.
Le patrouilleur polaire L’Astrolabe est un bâtiment dédié au ravitaillement de la base Dumont d’Urville. La France a ainsi réacquis la compétence de la navigation polaire, notamment grâce à ses partenaires étrangers. Ce savoir-faire pourrait être encore amélioré à l’avenir en poursuivant la coopération avec les autres pays. La Marine est prête à contribuer au développement et à la modernisation de la base Dumont d’Urville, qui fait face à des défis logistiques importants.   

Le ministère des Armées dispose d’une stratégie, récemment mise à jour, sur l’engagement français dans les zones polaires. La Marine est particulièrement attachée au respect du droit international. Si la zone antarctique est démilitarisée, la Marine y opère afin de faire respecter les engagements de la France. Concernant la confrontation possible avec des acteurs étrangers de plus en plus présents, tant en Arctique qu’en en Antarctique, la France doit montrer que son engagement est financier, civil, mais aussi potentiellement militaire. 

La Marine a vocation à opérer davantage dans les zones polaires arctiques car la confrontation militaire y est plus importante, notamment dans le contexte du réarmement russe autour de la base de Mourmansk. La Marine cherche par une navigation régulière et par la coopération à mieux maîtriser la partie arctique. En 2018, l’opération de traversée de l’Arctique par la route du Nord a été relevée par un bâtiment français. Les conditions géopolitiques ont désormais changé la donne.

Madame Antje Boetius, directrice de l’Institut Alfred Wegener, félicite la constitution du groupe d’études et salue le partenariat exceptionnel entre la France et l’Allemagne sur le sujet. 
Les travaux de l’Institut Alfred Wegener couvrent la recherche interdisciplinaire polaire, marine et côtière. Dans le contexte de changement climatique, il a le devoir de fournir des observations et des simulations scientifiques. Il apporte une contribution reconnue à l’international dans le domaine de la science polaire. Il compte environ 1350 employés et est doté d’un budget annuel de 160 millions d’euros. Les infrastructures polaires et océaniques rendent possible la présence dans ces régions afin de prendre le pouls des océans, de proposer des projections et des solutions. La décision du Gouvernement allemand de remplacer le brise- glace Polarstern âgé de quarante ans par un navire plus moderne, performant et durable a été essentielle pour le programme de recherche polaire en mer. Ce nouveau navire, qui représente un projet phare pour les technologies d’avenir durables européennes, pourra être utilisé toute l’année en Arctique et en Antarctique et sera doté d’une propulsion hybride et d’un équipement de robotique sous-marine. 

Lors du One Ocean Summit qui s’est tenu à Brest du 9 au 11 février 2022, l’Institut a commencé à concevoir un nouveau concept de collaboration pour l’observation synchrone des pôles sous la forme d’une mission pour l’humanité, où toutes les nations partageraient leurs infrastructures et leurs connaissances afin de mettre en évidence le rôle des pôles pour la planète. La stratégie polaire française porte une ambition similaire.   

Il faudra à l’avenir être en capacité d’observer les dynamiques surprenantes à l’œuvre, telles que la fonte de la banquise, le recul des glaciers, l’utilisation abusive des océans et ses conséquences sur les écosystèmes. Il est nécessaire de créer une véritable ambition au sein des organisations internationales afin de résoudre les crises du climat, de la biodiversité et de la santé de l’océan : à ce titre, la France et l’Allemagne ont déjà une expérience considérable de coopération dans la recherche polaire et disposent d’un accès commun aux infrastructures depuis des décennies.   

Monsieur le président Jimmy Pahun salue la présence de M. le député Philippe Berta (Modem),
rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles et de l’éducation sur le budget de la recherche lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2023, et de M. le président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire Éric Coquerel (LFI-NUPES).   

Monsieur Yan Ropert-Coudert, directeur de l’Institut polaire français Paul-Émile Victor (IPEV), observe que l’Antarctique est un continent sur lequel il reste encore beaucoup à découvrir scientifiquement. 
L’IPEV est un groupement d’intérêt public (GIP) dont le ministère de tutelle principal est le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche. Ses missions sont multiples : la sélection, la coordination et la mise en œuvre des projets scientifiques, mais également l’acheminement de matériel et de personnel sur le terrain, l’entretien des stations de recherche, le développement de nouvelles technologies pour la vie en milieu polaire, enfin recruter du personnel pour assurer la formation et la sécurité dans cet environnement hostile. Depuis plusieurs années, l’IPEV a un rôle dans la diffusion de l’information scientifique aux niveaux national et international. L’IPEV compte environ 50 personnes à son siège à Brest et plus de 200 personnes chaque année sur l’ensemble des sites. Plus de 90 projets de recherche sont soutenus par an, ce qui représente près de 400 scientifiques emmenés sur le terrain et 450 tonnes de matériel acheminées.   

L’IPEV est déployé en Arctique : la station franco-allemande àe Ny-Ålesund, dans l’archipel du Svalbard en territoire norvégien, est maintenue pendant toute l’année, mais de nombreux projets sont aussi réalisés dans l’ensemble du cercle arctique (Islande, Groenland, Alaska) – les projets en Russie étant pour l’instant suspendus. 

 L’IPEV est également présent en milieu subantarctique au niveau des TAAF. Trois zones sont particulièrement intéressantes pour observer les changements à l’œuvre dans l’océan indien et dans l’océan austral : l’archipel des Crozet, l’archipel des Kerguelen et l’île de Saint-Paul comportent des stations de recherche et des refuges qui permettent aux équipes scientifiques d’étudier au cœur des écosystèmes leurs paramètres physiques et biologiques. 

En Antarctique, l’IPEV compte trois sites principaux de déploiement de la recherche : la station Dumont d’Urville, la station Robert Guillard à cinq kilomètres de cette dernière, ainsi que la station franco-italienne de Concordia. Ces trois éléments font partie du même « système Concordia » : la station Concordia, au milieu du continent, ne peut être approvisionnée que par la voie terrestre ou aérienne. Elle dépend de L’Astrolabe, qui réalise un premier cordon entre l’Australie et la base Dumont d’Urville, ainsi que d’un convoi appelé « raid », qui, sur voie terrestre, emmène le matériel lourd depuis la station Robert Guillard.   

De nombreuses disciplines sont couvertes par l’IPEV : les sciences de la terre et de l’univers, avec la géophysique, la glaciologie, l’étude du climat, la conduite d’études sur la chimie et la physique de l’atmosphère, sur l’océan, sur l’astronomie, sur la biodiversité terrestre et marine, mais aussi les sciences de la conservation, les sciences de l’homme avec l’anthropologie, l’ethnologie, la géographie ainsi que les études biomédicales afin d’analyser comment l’humain va résister lors de séjours prolongés dans des conditions extrêmes.   

L’IPEV est très bien identifié par un grand nombre de partenaires nationaux, comme le comité national français des recherches arctiques et antarctiques (CNFRAA), l’alliance nationale de recherche pour l’environnement (AllEnvi), l’office français de la biodiversité (OFB) et la zone atelier antarctique (ZATA), mais également par ses partenaires internationaux. Ainsi, au niveau de l’hémisphère Nord, l’IPEV est interlocuteur du comité international des sciences de l’Arctique (IASC), du forum des opérateurs de recherches arctiques (FARO) et du comité des gestionnaires scientifiques de Ny-Ålesund (NySMAC). Au niveau de l’hémisphère Sud, l’IPEV participe aux discussions relatives au traité de l’Antarctique, à la commission pour la conservation de la faune et la flore marines de l’Antarctique (CCAMLR), au conseil des gestionnaires des programmes antarctiques nationaux (COMNAP) et au comité scientifique pour la recherche antarctique (SCAR).

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Concernant le renouvellement des infrastructures au niveau international, au-delà du Polarstern 2 présentée par la directrice de l’Institut Alfred Wegener, la Nouvelle-Zélande a investi 83 millions d’euros pour une refonte complète de sa base, tandis que la station belge Princesse Elisabeth se développe afin d’atteindre zéro émissions nettes toute l’année. L’Argentine, l’Australie mais également la Chine investissent dans des brise-glaces.   

L’intérêt du renouvellement des infrastructures réside dans la sécurité pour les personnes sur site, mais aussi dans la diminution de leur empreinte carbone afin d’aboutir à une présence française la plus vertueuse possible en matière d’environnement. Le renouvellement des stations est envisagé et le groupe d’études permettra de tenir régulièrement les parlementaires informés des avancées dans ce domaine.   

 Monsieur le président Jimmy Pahun souligne l’intérêt de la proposition de résolution du 18 mai 2021 invitant le Gouvernement à agir en faveur de la création d’aires marines protégées en Antarctique.   


Monsieur Marc Éléaume, enseignant-chercheur au Muséum national d’histoire naturelle et représentant scientifique français à la CCAMLR, propose de présenter la conservation des écosystèmes de l’océan austral, notamment dans le cadre de la CCAMLR. L’Antarctique et l’océan austral forment un « oasis de vie » avec des espèces uniques et une abondance de certaines espèces. 
Ainsi, il y a 100 millions d’oiseaux dans l’océan austral et le krill y est présent à hauteur de plusieurs centaines de millions de tonnes. Cet écosystème précieux est unique et fragile. La CCAMLR a pour rôle de protéger ces écosystèmes. C’est un organisme international dont la France est membre fondateur, composé de 27 pays, construit autour de deux entités : le comité scientifique, qui émet des avis vers l’instance décisionnelle, la commission, qui décide des mesures de conservations à mettre en œuvre. La zone gérée par la CCAMLR comporte notamment les îles Kerguelen et Crozet. 

Le programme de la CCAMLR se développe en deux axes principaux :     
1) la gestion des ressources exploitées afin qu’elles restent durables, en particulier le krill qui est au centre du réseau trophique en Antarctique puisqu’il nourrit notamment les baleines à fanons, les phoques, les manchots, et qui se nourrit lui-même de phytoplancton, ce dernier étant dépendant de la dynamique de la glace dans son environnement. La CCAMLR met en place des mesures de conservation afin de permettre l’exploitation durable du krill : protéger cette ressource, c’est protéger l’ensemble des écosystèmes de l’Antarctique ;  
2) la gestion des aires marines protégées (AMP) : la CCAMLR a décidé de mettre en place un système cohérent d’AMP tout autour de l’Antarctique. Les règles d’exploitation des ressources y sont strictes afin de limiter les impacts sur les écosystèmes. Trois propositions sont actuellement en discussion à la CCAMLR. L’AMP d’Antarctique de l’est a été initiée par l’Australie et la France : elle est composée de trois zones de références scientifiques, où les séries temporelles sont longues. En effet, il existe des programmes scientifiques dans la zone Dumont d’Urville depuis soixante ans. Le comité scientifique de la CCAMLR a validé le fait que cette AMP était fondée sur la meilleure science disponible. Toutefois, il existe des oppositions à la commission de la CCAMLR de la part de la Russie et de la Chine. La Chine a néanmoins montré plus de flexibilité dans les discussions cette année, ses principales critiques portant sur le fait que les données sont trop anciennes et qu’elles ne permettraient pas de mettre en place des indicateurs fiables afin de déterminer l’intérêt d’une AMP sur la protection des écosystèmes de la zone.   

La délégation française est parvenue à plusieurs conclusions. Tout d’abord, il est préférable pour le moment de parler à la Chine plutôt qu’à la Russie. En outre, puisque la Chine critique l’AMP de l’Antarctique-Est sur le fondement des données, il est nécessaire de faire de la diplomatie scientifique et de fonder la négociation sur de la science avec un programme en deux temps. L’objectif est de rendre accessibles et réutilisables toutes les données utilisées pour mettre en place l’AMP de l’Antarctique-Est : une fois combinées, elles permettront de co- construire avec l’ensemble des membres de la CCAMLR les variables qui mesureront la contribution de l’AMP pour les écosystèmes marins. Enfin, il convient de mener un programme de recherche intégré afin de comprendre le fonctionnement des écosystèmes en Antarctique.   

Madame Claire Giry, directrice générale de la recherche et de l’innovation au ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche (MESR), observe qu’il reste beaucoup à faire et que les enjeux sont immenses sur ces sites du monde polaire en proie à des conditions sévères, touchés par le changement climatique, et qui représentent une partie de la solution face à ce défi.
Madame la directrice salue la communauté présente à cette réunion mais également sur le terrain, sans qui il serait impossible d’avancer sur ces questions. Le domaine français des sciences polaires rassemble une communauté d’environ 600 scientifiques et regroupe des connaissances très larges : physique, cryosphère, atmosphère, océanographie, glaciologie, écologie et sciences humaines et sociales.

Elle s’appuie sur l’expertise logistique de l’IPEV pour porter des programmes scientifiques innovants sur les différentes bases françaises. Cette recherche polaire française se développe également dans d’autres régions, par exemple dans le cadre de la coopération internationale avec le Canada, l’Allemagne ou encore la Russie jusque récemment. Elle déploie également des moyens logistiques grâce au ministère des Armées avec L’Astrolabe. 

Madame la directrice relève que la « force tranquille » française est reconnue : une étude norvégienne publiée en 2017 situe la France au sixième rang mondial en recherche polaire, au cinquième rang mondial pour les publications sur l’Antarctique, au troisième rang mondial pour le nombre de publications sur l’Antarctique dans les revues scientifiques internationales les plus prestigieuses et au premier rang mondial pour les publications sur le milieu subantarctique. Il existe donc une force intellectuelle française considérable sur ces sujets, alimentée également par les travaux sur le changement climatique provenant d’autres domaines de recherche.   

Les pôles représentent des lieux uniques de savoir et de nouvelles connaissances à acquérir pour les scientifiques : ce sont des moteurs, couplés à la cryosphère, de la dynamique du climat. Une partie de l’incertitude sur l’élévation du niveau des mers provient de l’incompréhension des processus physiques à l’interface entre l’océan et les plateformes de glaces flottantes. Ce sont des lieux de biodiversité exceptionnels, adaptés aux conditions extrêmes de ces régions. Les pollutions qui touchent l’atmosphère, l’océan et le milieu terrestre sont exacerbées aux pôles. La transformation des milieux polaires aura un effet majeur sur les stocks de carbone ainsi que sur les populations humaines autochtones qui devront être accompagnées au mieux dans ces transitions. L’enjeu scientifique rejoint enfin un enjeu géostratégique évident : la France doit voir sa présence scientifique et diplomatique réaffirmée dans ces zones. 

Le MESR apporte différentes contributions à la recherche polaire : chaque année, des scientifiques sont recrutés au sein des organismes de recherche et des universités. Des scientifiques contribuent également, sans être spécialisés sur les pôles, à la recherche globale sur la biodiversité et le climat. Des chercheurs du centre national de la recherche scientifique (CNRS) et du commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) ont ainsi contribué récemment à une équipe de recherche danoise qui a permis de distinguer la contribution en gaz à effet de serre à l’échelle de chaque arbre et d’en faire un calcul par pays.   

Chaque année, des chercheurs peuvent présenter des projets auprès de l’Agence nationale de la recherche (ANR), qui a été fortement renforcée dans le cadre de la loi du 24 décembre 2020 de programmation de la recherche pour les années 2021 à 2030. En dix ans, la recherche polaire a obtenu environ 150 millions d’euros de la part de l’ANR, auxquels il faut ajouter le coût des infrastructures propres à la recherche polaire, présentes au sein de la feuille de route des infrastructures de recherche que le MESR pilote. Des réflexions vont être engagées dans les semaines à venir avec l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (IFREMER) sur la stratégie à mener sur la flotte. Il est nécessaire de faire des choix, fondés sur les besoins prioritaires de la communauté scientifique.   

Concernant l’IPEV, bras armé de la recherche scientifique polaire, il a besoin de se voir conforter sur ses effectifs, son budget et son organisation. Les missions du GIP sont importantes et nombreuses. Afin de travailler sur la capacité de l’IPEV à mener ses missions, un travail a été effectué en 2020-2021 sur son fonctionnement et ses besoins en associant le CNRS, l’IFREMER et le CEA. Le MESR continuera à travailler sur ces sujets dans le cadre d’une mission confiée au CNRS et à l’IFREMER sur le statut du GIP. Afin de remédier au déficit de personnel de l’IPEV, il a été décidé d’accroître son plafond d’emplois de 11 ETP en trois ans. Le CNRS assure également un apport en postes. Son budget a augmenté de 3 millions d’euros pour l’année 2023, passant de 14,7 à 17,7 millions d’euros.   

Madame la directrice observe que les stations antarctiques françaises sont vieillissantes et ne répondent plus pleinement aux exigences actuelles de science écoresponsable et ne permettent plus d’accueillir dans les meilleurs conditions les communautés scientifiques françaises et étrangères. Ces sites nécessitent des financements mais les montants actuels alloués constituent des impasses sur lesquelles il convient de travailler. La station Dumont d’Urville doit faire l’objet d’une inspection internationale à l’automne 2023. Le MESR a également demandé à l’IPEV de réaliser une première estimation financière des rénovations prioritaires.   

Madame la directrice souhaite que les chercheurs puissent continuer à travailler dans les zones polaires dans le respect de l’environnement, en les accompagnant si nécessaire dans les transformations de leurs pratiques.

Monsieur le président Jimmy Pahun salue la présence de M. le président de la commission des affaires étrangères Jean-Louis Bourlanges (Modem) à la session inaugurale du groupe d’études.  

 

Monsieur Olivier Poivre d’Arvor, ambassadeur des pôles et des enjeux maritimes, estime que les mots « attention, danger ! » caractérisent la situation actuelle et salue les actions pionnières de MM. Claude Lorius et Michel Rocard qui ont permis de porter l’attention sur les thèmes du jour. L’enjeu est celui de la situation des deux pôles, reliés par les sujets du climat, de la science, de la paix et de la sécurité.
Monsieur l’ambassadeur relève que la puissance polaire est un thème sur lequel M. Jean-Luc Mélenchon a beaucoup travaillé. Il salue le président de la commission des affaires étrangères, car c’est à l’ancien Premier ministre M. Jean Castex que revient la commande d’une stratégie polaire en juin 2021, validée le 5 avril 2022, puis endossée par le président la République le 1er septembre 2022.   

Les moyens mis à disposition, malgré l’engagement du MESR et de la communauté scientifique, n’étaient pas à la hauteur de l’enjeu. Les interventions de la représentation nationale ont été salvatrices à cet égard, encore récemment avec le PLF 2023.

Il convient désormais que les parlementaires puissent sortir de leur rôle des pompiers afin d’être de véritables porteurs : le projet d’une loi d’orientation polaire lui paraît à ce titre extrêmement utile. Les Norvégiens, les Australiens, les Italiens, les Allemands ont parcouru le chemin qu’il faut désormais suivre. Le Polarstern 2 allemand représente un investissement d’environ un milliard d’euros dont il convient de s’inspirer. 

La stratégie polaire ne répond pas à toutes les questions mais trace un chemin avec une proposition principale : la nécessité du travail interministériel afin d’ordonner l’action. La stratégie polaire prévoit la réunion d’un comité interministériel des pôles qui devrait programmer des crédits budgétaires jusqu’en 2030. Une enveloppe de 400 à 500 millions d’euros avait été présentée par Monsieur l’ambassadeur à Monsieur le Premier ministre Jean Castex. La variable d’ajustement est la question du brise-glace : aujourd’hui, cette question n’est pas urgente car il existe suffisamment de pays qui ont des brise-glaces ou qui s’apprêtent à en construire. En outre, la France a signé des accords avec les Canadiens.   

Le président de la République devrait organiser en novembre 2023 une première rencontre internationale polaire. Un des objectifs est de diffuser à l’échelle internationale l’idée d’une décennie du monde polaire, sachant qu’une année polaire internationale devrait se tenir prochainement. Il est important qu’un mouvement international permette d’aligner les programmes scientifiques, en particulier l’Union européenne qui n’a pas un programme à la hauteur de l’ambition polaire.   

L’IPEV devrait avoir dans le cadre de la stratégie polaire des missions et des moyens élargis, à la fois en matière de coordination scientifique, de logistique avec la rationalisation des dispositifs entre l’IPEV et les TAAF, mais aussi dans le domaine de l’éducation. Hormis l’espace des mondes polaires à Prémanon, il n’y a pas de lieu ni de musée en France qui montre l’histoire polaire.   

Ce dispositif passe également par de nouveaux moyens en mer et dans les airs. La fondation privée Albedo, qui vient d’être créée sous l’égide du CNRS, accordera des financements supplémentaires à hauteur de dix millions d’euros, ce budget devant être triplé d’ici deux ans. Monsieur l’ambassadeur observe que les situations actuelles en Arctique et en Antarctique ne véhiculent guère les valeurs de la paix. Il convient pour la France d’avoir une présence affirmée au Conseil de l’Arctique, qui ne se réunit pas depuis presque deux ans. Le passage de témoin entre les présidences de la Russie et de la Norvège est un enjeu important. Il est important que les Européens travaillent ensemble autour de l’Arctique et réinvestissent le Groenland, où le président de la République a prévu de se rendre.   

Grâce à la stratégie polaire, la fondation Tara Océan a pu être soutenue à hauteur de 13 millions d’euros dans le cadre du plan France 2030. Il convient d’être tous ensemble les champions de l’Antarctique afin de défendre ce traité, même si la date de 2048 semble lointaine.   

La question du tourisme est très importante et il convient d’avoir de plus en plus d’exemplarité en la matière. Les Pays-Bas ont organisé une réunion sur ce sujet il y a quelques semaines, à laquelle la France était représentée. La responsabilité des Français sur ce sujet est plutôt moindre puisqu’elle n’est pas le pays qui transporte le plus grand nombre de touristes ni n’est le pays principal d’origine de ces touristes. En outre, la principale compagnie française, Ponant, est considérée comme exemplaire sur le plan environnemental. 

En matière de protection de la biodiversité, tous les pays s’accordent sauf la Chine et la Russie. Une collaboration avec les scientifiques chinois pourrait modifier l’issue des négociations à la CCAMLR dans les années qui viennent. Il est également nécessaire de mieux connaître l’océan austral, ce qui est le projet de M. Jean-Louis Étienne avec le navire océanographique Polar Pod.   

Monsieur l’ambassadeur rendre hommage aux chercheurs et indique que le comité interministériel des pôles devrait se réunir prochainement afin de programmer les crédits nécessaires aux études et à la rénovation des infrastructures. La montée des eaux est évaluée à 1m10 en 2100 et pourrait même s’élever à 6 mètres en 2300 : il existe une carte des territoires français menacés qui doit permettre aux Françaises et aux Français de prendre conscience de l’urgence de l’enjeu.   

Monsieur Niels Engelschiøn, ambassadeur de Norvège en France, indique vouloir se concentrer dans son propos sur la question de la sécurité en Arctique.
L’Arctique n’est pas une zone lointaine ou inexplorée : une grande partie de la nation norvégienne habite au nord du cercle polaire, avec une activité économique importante. Elle constitue l’intérêt stratégique principal du gouvernement norvégien. La guerre brutale et illégale de la Russie contre l’Ukraine entraîne des répercussions sur tous les aspects de la coopération internationale. Les forces armées norvégiennes suivent de près l’activité russe dans la région et s’appuient sur leurs partenaires internationaux, car il est important pour la Norvège d’agir avec ses alliés européens et transatlantiques. L’adhésion de la Suède et de la Finlande à l’Organisation du traité de l’Atlantique nord (OTAN) renforcera pour la Norvège le lien entre le Grand Nord et la mer Baltique. La coopération entre les marines norvégiennes et françaises est très appréciée et Monsieur l’ambassadeur souhaite la voir continuer à se développer.

Une présence renforcée dans le Grand Nord et en mer du Nord est essentielle, comme le démontre le sabotage d’infrastructures énergétiques en mer Baltique. La contribution des alliés, dont la France, à la surveillance des installations offshore est appréciée. Le Premier ministre norvégien a reçu la présidente de la Commission européenne et le secrétaire général de l’OTAN la semaine précédente sur la plateforme offshore Troll A qui livre à elle-seule 11 % de l’ensemble du gaz consommé dans l’Union européenne. Les questions climatiques et énergétiques ne peuvent être séparées des questions de sécurité.   

La coopération au sein du Conseil de l’Arctique sous la présidence russe actuelle est impossible. L’objectif principal de la présidence norvégienne au printemps prochain est de maintenir le rôle du Conseil de l’Arctique comme un forum multilatéral, mais les choses ne reviendront pas à la normale avec la Russie sous la présidence norvégienne. Pour autant, la Norvège a réussi à reprendre l’activité dans des projets qui ne comportaient pas de participation russe, soit environ deux tiers de 130 projets. L’objectif est de maintenir les structures et les réseaux du Conseil afin de rester concentrés sur les questions importantes.   

Monsieur l’ambassadeur relève l’intérêt de la coopération internationale en matière de recherche polaire au Svalbard, dont font partie l’IPEV et l’Institut Alfred Wegener. La recherche polaire norvégienne en Antarctique suscite aussi un intérêt croissant et une modernisation de la base norvégienne est envisagée au regard des nécessités climatiques.   

Madame Gillian Bird, ambassadrice d’Australie en France, relève la force de l’engagement australien pour le monde polaire et la qualité de la coopération avec la France.
La France et l’Australie ont beaucoup fait pour sauvegarder l’Antarctique, depuis les origines du traité sur l’Antarctique en 1959 dont ils ont été les deux premiers signataires. Ces deux pays sont voisins, dans l’Antarctique comme dans le Pacifique. Ils ont permis la signature du protocole de Madrid en 1991, qui a beaucoup fait pour préserver l’environnement en Antarctique et est aujourd’hui plus important que jamais. C’est dans les régions polaires que l’on voit les plus importants effets du changement climatique et la montée des eaux menace au premier plan les États insulaires du Pacifique : pour cette raison, la coopération franco-australienne pour combattre les effets du changement climatique est particulièrement importante. À ce titre, un projet soutenu par l’Australie fondé sur l’extraction de carottes glaciaires vise à étudier près d’un million d’années d’histoire climatique.   

Madame l’ambassadrice salue le travail pour la conservation de la faune et la flore antarctiques de la CCAMLR, dont le siège est situé à Hobart en Australie, et souligne l’importance de la coopération avec la France pour l’avenir.   

Monsieur Éric Coquerel, président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire (LFI-NUPES) salue la franchise de l’intervention de Monsieur l’ambassadeur des pôles et des enjeux maritimes et considère que la dette climatique et environnementale est indiscutable et ne s’éteindra pas.

La France, qui possède la deuxième surface maritime au monde et est présente sur tous les continents, est une nation avec un devoir universel et un rôle spécifique. Concernant le classement de l’excellence française sur la recherche polaire mentionné par Madame Claire Giry, il aurait pu être intéressant de mettre en perspective le classement de la France en matière d’investissement pour la recherche polaire – au quinzième rang d’après Monsieur l’ambassadeur des pôles et des enjeux maritimes.   

Monsieur le président de la commission des finances rappelle les efforts entrepris avec Monsieur le président du groupe d’études afin d’obtenir des crédits budgétaires pour la recherche polaire lors des années précédentes. Le décalage avec l’Allemagne, qui n’a pourtant pas les mêmes responsabilités au regard de sa surface maritime moindre, est source de leçons. En tant que président de la commission des finances et amoureux des territoires polaires, il appuiera l’adoption de l’enveloppe mentionnée de 400 millions d’euros en faveur de la stratégie polaire d’ici à 2030.   

Monsieur Jean-Louis Bourlanges, président de la commission des affaires étrangères (Modem) estime que le sujet du groupe d’études intéresse beaucoup la commission des affaires étrangères, qui soutient les efforts budgétaires inlassablement relancés par Monsieur le président du groupe d’études.
L’action actuelle de la commission des affaires étrangères est caractérisée par une « extension du domaine de la lutte » : même si la conjoncture internationale ramène à des modes de conflits traditionnels et extrêmement préoccupants comme en Ukraine, il convient de lancer une réflexion sur des formes d’action et de solidarité internationale totalement insolites.

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Les océans, les pôles, l’espace sont devenus pour la commission des affaires étrangères des enjeux fondamentaux. La commission perçoit également les différences d’approche entre les deux pôles, avec des menaces néanmoins comparables, et essaie de mettre en place des mécanismes de réflexion et d’action qui passent largement par des moyens multilatéraux, pour lesquels il serait souhaitable que l’Union européenne s’engage davantage car des modifications très substantielles des modes de vie et de production sont à venir. 

Monsieur le président de la commission des affaires étrangères interroge le montant de l’enveloppe de 400 millions d’euros évoquée pour mettre en œuvre la stratégie polaire d’ici à 2030 et craint que le défi à relever ne soit beaucoup plus important et multidimensionnel. Il convient désormais de réécrire la grammaire des relations internationales et de la politique étrangère. L’entreprise est exigeante, ambitieuse et impose un impératif catégorique.   

Monsieur Pascal Lamy, président du Forum de Paris pour la paix souhaite s’exprimer en tant que co-président de la coalition mondiale Antarctica 2020, qui existe depuis cinq ans et dont l’objectif est de protéger l’océan austral, en tant que président du Forum de Paris pour la paix, qui a d’ailleurs primé la coalition lors de sa première audition en 2018, ainsi qu’en tant que président de la mission européenne Starfish qui supervise un milliard d’euros de crédits de recherche entre 2020 et 2030 en faveur de la régénération de l’hydrosphère européenne et produira un jumeau digital de l’océan européen en 2025.   

Monsieur Pascal Lamy formule une proposition concrète : il appuie l’idée qu’amener les Chinois à accepter des mesures de protection supplémentaires dans l’océan austral ne passera pas par les voies diplomatiques traditionnelles mais par la diplomatie scientifique. Dès lors, un instrument de cette diplomatie scientifique pourrait être, si les États européens participant à la CCAMLR s’accordent sur le sujet, d’ajouter au programme européen Starfish un jumeau digital de l’océan austral qui permettrait d’améliorer les conditions du dialogue avec les Chinois. L’objectif serait donc, pour l’ensemble des acteurs présents, d’insister ensemble à Bruxelles sur ce point qui permettrait de faire une grande avancée.   

Monsieur Jean Jouzel, paléoclimatologue, remercie le président et la présidente du groupe d’études au nom de la communauté scientifique et de celles et ceux qui s’intéressent aux régions polaires.
L’excellence des recherches en la matière, conduites sous le prisme de la collaboration internationale, a été soulignée.   

Concernant ses domaines d’expertise, que sont les évolutions passées du climat et de l’environnement, les régions polaires fournissent des informations essentielles et directement pertinentes à l’avenir de la planète : par exemple, sur le lien entre le climat et l’effet de sphère, l’évolution climatique rapide ou encore l’élévation du niveau de la mer. L’élévation du niveau des mers d’1m50 d’ici la fin du siècle est évoquée en raison d’un risque de déstabilisation d’une partie de l’Antarctique de l’ouest. Si le rapport du GIEC n’en fait pas son hypothèse principale, il n’exclut pas la possibilité d’un tel niveau. 

En tant qu’ancien directeur de l’IPEV dans les années 2000, Monsieur Jean Jouzel souligne la richesse de cet organisme en termes d’écologie, de recherches en matière de vivant, de biodiversité et des sciences de l’homme. S’il est nécessaire de faire des choix, il faut soutenir l’ensemble. Il considère que le soutien de l’IPEV a été déterminant dans la conduite de ses travaux.   

Madame la présidente Clémence Guetté remercie l’ensemble des intervenants pour leurs propos passionnants.

Les co-présidents ont cherché à apporter une lumière complémentaire sur leurs ambitions scientifiques et diplomatiques et se félicitent de la présence des présidents des commissions des finances et des affaires étrangères. En effet, leur soutien au groupe d’études permettra d’agir afin que le projet discuté ce jour dispose des moyens nécessaires à son accomplissement et soit à la hauteur de l’investissement de l’ensemble des parties prenantes. La connaissance en matière de changement climatique est indispensable pour les années à venir : 2100 et 2300 correspondent à l’après-demain et il convient de mettre les moyens à la hauteur des enjeux dès aujourd’hui.   

Après avoir beaucoup parlé de recherche polaire lors de cette réunion, le groupe d’études travaillera aussi sur les grands fonds marins et a pour ambition de travailler sur les AMP dans le cadre de rendez-vous intermédiaires. Madame la présidente donne rendez-vous aux participants l’année prochaine, afin de faire le bilan des actions qui auront pu être entreprises dans le cadre du prochain projet de loi de finances dans une démarche transpartisane. Monsieur le président a en effet démontré dans les années précédentes qu’il était possible de réunir toutes les sensibilités politiques afin de réunir les crédits et de relever l’ambition budgétaire.   

La réunion est levée à 16 h 40.

Les photographies affichées lors de la session sont l'œuvre de M. Erwan Amice, plongeur scientifique et photographe. Les croquis glissés dans le présent document ont été réalisés par M. Jacques Rohaut, Président de l'Association des Peintres officiels de la Marine, Mme Anne Smith et M. Emmanuel Lepage, Peintres officiels de la Marine.

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